« Tondo Artis: Fair or Unfair? »

Tondo Artis, Fair or Unfair est un film picaresque, un road-movie d’un genre nouveau dédié aux foires d’art et au monde de l’art. Le caravansérail disséquant le milieu de l’art et sa faune, consacré aux VIP’s, aux privilèges, à l’argent, aux galeries d’art. Un film sur le first call et le second choice, sur les collectionneurs, les visiteurs, les promeneurs, les imposteurs et ultimement sur nous toutes et tous.

Ni documentaire ni fiction, ce film n’entend rien prouver ni dénoncer, il s’impose et ne peut être qu’une œuvre d’art  à part entière, constitué de la combinaison de critiques, d’inventions et de plaisirs, tout ça en même temps et partagé par les publics. 

Tondo Artis est aussi un film qui mets en perspective notre perception de l’espace et de la représentation du réel. Il nous demande de nous positionner, de prendre position. Dans cette orgie de superlatifs des foires d’art, les valeurs sûres comme le haut et le bas, le point de vue et le point de fuite, les lois de la grâvité ne sont plus des évidences dans ce bombardement d’images, de formes, de couleurs, de sensations dans cette orgie de superlatifs des foires d’art …

La forme de ce film est circulaire, il est rond, c’est un tondo, un tondo animé, c’est le Tondo Artis, le cirque de l’art ! En effet, les foires d’art se déplacent comme des cirques, des spectacles toujours plus grands, plus osés, plus sexy et plus chers, à l’instar des fêtes foraines et de tout ce qui se qualifient de foires… C’est les Expositions Universelles de l’art en permanence, d’un art mondialisé comme toutes les valeurs marchandes. Et tandis que les foires d’amusement, les « fun-fairs » sont populaires, les foires d’art sont élitistes, à tous les niveaux, et ceci surtout, bien sûr, pendant les journées VIP, où tout est gratuit !

Tondo Artis est, en quelque sorte, une improvisation conceptuelle, fait de travellings opérés de manières différentes selon les foires et la foule, à partir de ma caméra panoramique Ladybug III. Le plus souvent porté sur son monopod, je pénétrais avec elle des sculptures et m’approchais au plus près d’une œuvre, pour regarder également derrière les coulisses, l’envers du décor. Bien évidemment, celui qui filme, le filmeur, est aussi filmé, et de facto devient acteur.

Tondo Artis est une œuvre souvent Provocatrice, toujours Polyfocale, parfois Perverse mais Poétique, et idéalement Publique !

T.A. est le fruit d’un périple de cinq voyages déstinés à filmer et enregistrer du son dans trois villes accueillant ces foires d’arts – il est le résultat de la fidélité de mon équipe et de mon co-producteur … pendant sept ans !
Marin Kasimir

18.08.2019

The (un)fair ground of contemporary art
The fun fair of contemporary art
Tondo Artis, or the rollercoaster of contemporary art
Marin Kasimir on the rollercoaster of contemporary art

 

Tout a commencé avec la Ladybug, une camera au nom énigmatique et sensuel qui permet, telle une mouche, de voir et de filmer à 360 degrés. L’artiste Marin Kasimir avait constitué un groupe de 15 amis du monde de l’art bruxellois pour l’aider à en faire l’acquisition. En tant que membre de ce Club des XV, je m’étais dit que notre Ladybug pourrait capturer de façon particulièrement saisissante le Rundhof, la cour circulaire intérieure du Palais des Congrès de Bâle, qui attire tous les ans le gratin du monde de l’art contemporain à l’occasion de la preview de Art Basel.

 

Je n’imaginais pas en 2012 que cette idée toute simple de vouloir rentabiliser un investissement en matériel, qui me venait de mon expérience pratique de producteur audiovisuel, allait encore m’occuper huit ans plus tard.

 

Je connaissais alors peu Marin Kasimir et j’ignorais encore qu’il ne se contenterait pas d’une ou deux de ces images panoramiques ou sphériques qui avaient fait sa réputation.

 

Dès le premier jour, quelques unes des images et des sons volés titillèrent en effet sa curiosité et son sens critique.

 

Les foires d’art attirent en effet collectionneurs, journalistes, commissaires et artistes comme des… attrape-mouches. Ils ne peuvent s’empêcher de vouloir y aller, au risque de rester collés au ruban.

 

C’est dans les foires que la FOMO (Fear Of Missing Out) est la plus intense. Les galeristes veulent proposer les meilleures pièces, les visiteurs ont peur de rater la plus belle fête.

 

Jamais découragé, et attiré sans doute autant par la qualité des œuvres exposées que par la superficialité de certains visiteurs, Marin Kasimir n’arrêta pas de visiter les foires et de les filmer.  Il retourna deux fois à Bâle, traversa l’Atlantique deux fois de plus pour aller à l’édition américaine qui se tient à Miami, sans oublier des visites en voisin à Art Brussels.

Il courut les foires d’art pendant plusieurs printemps, automnes et hivers. A chaque voyage son lot de pépites visuelles et sonores sur le rapport entre art et alcool, art et sexe, art et sport et surtout art et argent.  Et pendant la pause estivale, il faisait des tours avec ses deux garçons sur les montagnes russes de la Foire du Midi, la fête foraine des quartiers populaires de Bruxelles…

Tondo Artis : Fair or Unfair ?  rassemble donc 18 minutes des péripéties de l’artiste dans ces grand-messes : au plus près des œuvres, des collectionneurs et des pique-assiettes. La vidéo restitue sans commentaire sa vision à la fois fascinée et caustique sur cette grande fête itinérante.

Tondo Artis étant un film circulaire non seulement dans sa forme mais aussi sur le fond, Marin cherchait sans cesse comment affiner le propos. Son processus créatif semblait sans fin.

Puisque j’avais, dès le début, accepté de participer à cette aventure aux côtés de Marin, celui-ci me demandait régulièrement conseil ou soutien, moral ou financier.

Quelques mois après la dernière foire d’art contemporain à s’être tenue, le montage était enfin final et je me suis demandé si le film était le témoignage d’une époque et d’un phénomène définitivement révolus.

La FOMO a-t-elle laissé place à la JOMO (Joy Of Missing Out) ? Fair or Unfair ?
Aux spectateurs désormais d’apporter leur réponse.
Frédéric de Goldschmidt

13/08/2020